Un mystère plane dans cette maison. Je ne fais rien, mais je suis toujours fatigué, je dirais même fourbu. Vous devinerez sans peine qui fait tout le travail.
Je viens tout juste de terminer la lecture du roman The Leisure Seekers, qui parle d’un couple d’octogénaires, le mari atteint de démence grave et la femme d’un problème de santé incurable. Le mari se laisse plus ou moins entraîner au voyage, un long périple sur la légendaire route 66 aux États-Unis.
En dépit des objections de sa famille, le couple décide de prendre la route dans son véhicule récréatif. C’est lui qui conduit parce qu’elle en est incapable et elle lui sert de navigatrice. Ils sont sur la route pendant des jours et des jours. Elle lui demande souvent « Ne sais-tu pas comment te rendre là-bas? » Il prétend parfois le savoir. Pour sa part, elle n’est pas convaincue que « tous les souvenirs enfouis dans la tête de son mari soient irrémédiablement perdus ».
Ce livre, de même qu’un deuxième, Bob’s Poems, nous ont été offerts par une femme à son retour de Floride. Nous n’avions jamais rencontré Marg auparavant, mais nous allons la rappeler pour l’inviter à venir récupérer ses livres et à prendre le thé avec nous, car nous aimerions la revoir.
Cette lecture a été difficile pour moi, à la fois bouleversante et amusante, mais j’ai néanmoins fait l’effort de lire le bouquin jusqu’au bout.
J’ai également lu un article sur la « détérioration de la mémoire et de la capacité de penser, et sur la façon d’affronter les différentes étapes de la démence ». J’ignore à quel stade j’en suis. Les conseils offerts aux personnes atteintes de démence ne s’appliquent pas tous à mon cas. Peut-être est-ce parce que je peux compter sur une partenaire en la personne de Dorothea.
Je ne sais pas ce que les amis qui nous rendent visite peuvent observer, mais ils ne semblent jamais mal à l’aise.
Vous vous souviendrez peut-être d’une chronique antérieure où je mentionnais m’être porté volontaire pour des essais cliniques d’un nouveau médicament. J’ai alors fait des cauchemars hallucinants. Lorsque j’ai cessé de prendre les pilules en question, les mauvais rêves sont disparus, mais j’ai perdu l’appétit. Alors, voilà.
Bien des Canadiens connaissent Jann Arden, une comédienne canadienne hilarante qui se produit au petit écran avec des gens comme Rick Mercer. Dans un nouveau livre, à la fois touchant et drôle, Feeding my Mother, elle explique comment elle s’occupe de sa mère tout en poursuivant sa carrière. Sa mère, qui vit près de chez elle, a des hauts et des bas. Un merveilleux livre, mais difficile à lire pour quelqu’un atteint de démence.
J’ai récemment fréquenté Jean, âgée de 94 ans, mais qui a encore toute sa lucidité. Elle désirait me rencontrer. J’ai conclu que c’était pour me prouver à quel point elle est encore alerte.
Donna et Dorothea ont éclaté de rire lorsqu’elle a bondi de son fauteuil alors que j’avais toutes les misères du monde à me relever. Elle est lucide et très heureuse, et elle parle amoureusement de son défunt mari.
Décidément, les gens que nous rencontrons, Dorothea et moi, depuis que j’ai parlépubliquement de ma démence sont des plus intéressants.
La vie poursuit son cours et j’en profite à fond.
http://thechronicleherald.ca/opinion/1557293-darce-fardy-meeting-the-most-interesting-people